Communication virale
Résultat d’un test de dépistage contre le papillomavirus (HPV) : “Présence d’un ou plusieurs HPV considéré(s) comme potentiellement oncogène, dont un HPV 16”. Aucune autre indication sur le compte-rendu d’analyse, reçu par email.
Les HPV 16, me dit Google, sont, avec les HPV 18, “retrouvés dans 70 % des cancers du col de l'utérus et ont la réputation d'être les plus agressifs parmi les virus HPV”.
Toubib en vacances, pas de numéro de téléphone où joindre le labo.
Projection en chimio, mort dans d’atroces souffrances. Angoisse maximale.
Est-il raisonnable de laisser les femmes avec si peu d’information ?
Pour comprendre… point rapide sur le HPV :
Le HPV est l’infection sexuellement transmissible la plus fréquente.
Près de 80% des hommes et des femmes sont infectés par le HPV au cours de leur vie. En gros, toute personne ayant eu plus d’un partenaire sexuel, qui aurait lui-même eu plus d’un partenaire sexuel, est potentiellement porteuse du HPV. Il en existe plein de souches, plus ou moins agressives.
Depuis 2018, le dépistage systématique du HPV par le test HPV-HR est recommandé pour les femmes de 30 à 65 ans. Ce test permet de déceler le virus conduisant aux mutations des cellules du col de l’utérus (NB : un frottis détecte quant à lui les cellules ayant muté à cause du virus). Il permet donc une vigilance en amont. Le test HPV-HR est réalisé tous les 5 ans s’il est négatif (pour les femmes entre 25 et 29 ans, les modalités de dépistage du cancer du col de l’utérus antérieures à 2018 restent les mêmes : un frottis tous les 3 ans après 2 frottis normaux à 25 et 26 ans).
Si le test HPV-HR est positif, lorsque les souches sont à haut risque cancérogène, il doit être complété par un frottis pour voir si tout est normal au niveau des cellules. Dans la plupart des cas, le virus se résorbe tout seul, mais dans de rares cas il provoque des lésions pré-cancéreuses puis cancéreuses. D’où la nécessité d’une surveillance rapprochée (frottis annuel pour surveiller l’évolution des cellules, colposcopie si le frottis n’est pas normal), pour une prise en charge précoce des lésions.
Répétons-le : le cancer du col de l’utérus est quasi-exclusivement dû aux papillomavirus*.
D’ailleurs, le HPV est aussi à l’origine d’autres cancers, des zones intimes et des voies aérodigestives supérieures (bouche, gorge), chez les femmes ET chez les hommes.
Pour arrêter la chaîne de transmission du virus, il y a la vaccination. Le vaccin anti-HPV protège contre 70% à 90% des HPV à haut risque cancérogène, et présente un rapport bénéfices/risques largement positif**. En gros, il est safe. Pour être efficace, il doit être administré aux jeunes garçons et aux jeunes filles avant les premiers rapports sexuels.
Pour l’anecdote, le HPV et le cancer du col de l’utérus ont quasiment disparu en Australie, en conséquence de vastes campagnes de vaccination (pour les filles et les garçons) et de dépistage, menées depuis le début des années 2000***. En France, la couverture vaccinale contre le HPV était de 41% en 2021 (45,8% pour les filles et 6% pour les garçons)****. C’est quand même dingue…
Vaccinons nos enfants.
Cela étant posé et pour revenir à ma petite histoire, ne pourrait-on pas envisager, sur le compte-rendu du labo, un petit :
“PS : la présence d’un ou plusieurs HPV potentiellement oncogène n’est, certes, pas à prendre à la légère. Pour autant Madame, ne vous inquiétez pas. Dans la plupart des cas, le HPV disparaît tout seul. Afin de s’assurer que tout va bien, vous devez réaliser un frottis en complément de ce test.”
* https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/cancers/cancer-du-col-de-l-uterus
** Voir le rapport du Haut Conseil en Santé Publique, téléchargeable sur : https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=454
Info sur le dépistage : https://www.has-sante.fr/jcms/p_3192618/fr/depistage-du-cancer-du-col-de-l-uterus-le-test-hpv-hr-recommande-chez-les-femmes-de-plus-de-30-ans