Penser la violence comme un objet

Réflexions synthétiques issues d’un cours donné sur le sujet auprès de futurs cadres de santé.

En tant que risque psycho-social, la violence au travail peut faire l’objet de mesures de prévention primaire, secondaire et tertiaire.

La violence, c’est un passage à l’acte, verbal ou physique, lorsqu’on est en incapacité de comprendre ou de se faire comprendre. S’il y a trop de frustration, ça explose.

Les gens ne pètent pas les plombs par plaisir. Il y a toujours une raison, même mauvaise, à cela.

Si on agit sur ces raisons, on peut agir sur la violence.

Il faut donc d’abord identifier les causes, ce qui nécessite une réflexion en amont (prévention primaire).

Il faut ensuite être organisé pour intervenir lorsque la violence survient. Cela implique d’avoir un plan à mettre en œuvre (prévention secondaire).

Il faut enfin soutenir les personnes qui en sont victimes. Avec une démarche d’accompagnement et de suivi (prévention tertiaire) (nous avons vu précédemment à quel point ce suivi est important).

L’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) relève que les questions de sécurité sont très peu prises en compte dans les établissements de santé.

La plupart des établissements gèrent la violence au coup par coup, sans stratégie globale de prévention ou d’intervention.

L’ONVS affirme par ailleurs que le directeur d’établissement, investi d’une mission de sécurité et de protection (articles L. 4121-1 à L. 4121-4 du code du travail relatifs à l’obligation de sécurité de l’employeur ; article L.134-5 du code général de la fonction publique), doit traiter la violence de manière globale (aspects humains, médicaux, psychologiques, administratifs, juridiques, techniques, logistiques, architecturaux, financiers, formations théoriques et pratiques, communication, etc.) dans le cadre d’un projet de service impliquant l’ensemble des personnels (tous les mots sont importants).

« Il s’agit d’un acte majeur de gouvernance en vue de la gestion des risques pour lequel le directeur dispose de la vision globale de cette problématique et des enjeux » (Rapport de l’ONVS 2022*, p. 8).

La violence coûte cher, humainement et financièrement. 

La violence doit être appréhendée. Comme un objet. Ce que les compagnies aériennes ont pour leur part bien intégré dans la formation des personnels navigants.

Quelques mesures de prévention primaire :

  • Mise en place d’une convention « santé-sécurité-justice » (modèles disponibles sur le portail de l’ONVS**) 

  • Management participatif du personnel autour d’un projet « prise en charge de la violence au sein de l’établissement »

  • Élaboration de procédures d’alerte et d’intervention, désignation de personnes-contact

  • Formation des personnels, y compris médicaux, sur la gestion de la violence physique et verbale (techniques de communication et de contention non violentes)

  • Mise à jour des livrets d’accueil des patients et des familles

  • Analyse systématique des fiches d’évènements indésirables

  • Aménagement des lieux et des espaces adaptés au contexte de la spécialité

Quelques mesures de prévention secondaire :

  • Mise en œuvre des procédures mises en place en prévention primaire 

  • Impératifs : cohérence des interventions et cohérence des règles pour les usagers 

Quelques mesures de prévention tertiaire :

  • Suivi de la victime par un psychologue

  • Soutien des RH

  • Lettre de “rappel à la loi” à l’auteur des faits

  • Lettre de soutien de la direction au personnel victime

  • Application des pouvoirs de police général du Directeur

  • Aide à la victime dans son dépôt de plainte

Pléthore de bonnes idées mises en œuvre par des établissements pour diminuer la violence et les comportements agressifs figurent dans le Guide méthodologique de l’ONVS sur la prévention des atteintes aux biens et aux personnes en milieu de santé (2017) : 

https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/guide_onvs_-_prevention_atteintes_aux_personnes_et_aux_biens_2017-04-27.pdf

Voir également, pour inspiration, la réorganisation de l’accueil aux urgences de l’hôpital Bichat (pp. 44 et suivantes).

* Rapport de l’ONVS 2022 sur les données 2020-21 : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_onvs_2022_donnees_2020-2021_.pdf

 

**Le portail du ministère de la santé fournit de nombreux documents, fiches pratiques et modèles sur la question : https://solidarites-sante.gouv.fr/professionnels/ameliorer-les-conditions-d-exercice/observatoire-national-des-violences-en-milieu-de-sante/dgos-onvs-documentation-pratique

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