Je ne sais pas, donc j’écoute
D’aucuns pensent que la psychologie cognitive* est la seule qui vaille, parce qu’elle est scientifique. Entendre : mesurable et chiffrable.
Il est vrai que les chiffres parlent.
Mais s’ils parlent, c’est donc avec des mots…
Des psychologues qui font passer des tests cognitifs, il en est qui élaborent leurs conclusions sur la base des seuls résultats chiffrés (donc scientifiques). La personne testée est alors objet d’évaluation.
Ces psys-là sont très premier degré.
C’est comme si dans un procès pénal, le juge prenait en compte les seuls faits matériels à l’origine d’une infraction, sans examen du contexte. Qui vole un œuf, vole un bœuf !
Cette posture de scientificité qui conduit à interpréter les chiffres sans les faire parler, est selon moi dangereuse.
Les psychologues ne sont pas des mathématiciens. Ça se saurait !
Une amie me disait avec ironie : « quand on cherche, on trouve ». Cela s’appelle, en sciences comportementales, le biais de confirmation. C’est un mécanisme cognitif qui nous pousse à privilégier les informations qui vont dans le sens de nos a priori : « je sélectionne ce que tu dis, ou ce que je trouve, en fonction de ce que je pense ».
Quid du reste ? De ce que tu dis et qui viendrait toucher mes impensés ?
La posture d’autorité induite par la posture de scientificité (je sais donc je sais) peut avoir pour conséquence une certaine cécité intellectuelle. Ou, disons-le plus modérément, un manque de flexibilité mentale.
Déjouer le biais de confirmation suppose de lâcher ses a priori. De délaisser une posture haute (c’est moi qui fais parler les chiffres) pour adopter une posture plus humble (explique-moi ce que je vois dans les chiffres).
Les tests cognitifs mesurent des aptitudes ou des capacités à un instant t. Ils ne les expliquent pas. Ils peuvent aiguiller le professionnel qui souhaite vérifier ou infirmer des hypothèses. Ces hypothèses sont formulées à partir de mots donnés. Sur un vécu, un contexte ou une histoire. Non quantifiable et non chiffrable.
Bref, les tests nécessitent, pour être interprétés, d’être articulés aux situations, dans le but de les éclairer. La personne testée est alors sujet d’évaluation. N’en déplaise aux détracteurs de la psychologie « non scientifique », clinique.
En somme, le psychologue, en tant que sujet supposé savoir**, est justement celui qui ne doit pas savoir. C’est parce qu’il sait qu’il ne sait pas, qu’il écoute. Et donc, qu’il peut être amené à éventuellement comprendre.
Le psy fait ainsi figure de chercheur, qui ne doit pas chercher pour pouvoir trouver.
Lacan si tu m’entends ?!
* Branche de la psychologie qui s’appuie sur la méthode expérimentale pour étudier le champ des fonctions mentales (attention, mémoire, perception, raisonnement, résolution de problèmes, intelligence, langage, créativité…).
** Personne à qui l’on prête un savoir que l’on n’a pas.